
Introduction : Le jardin de semences
L’avantage des plantes indigènes, c’est que quand elles sont utilisées à leur juste fonction, les graines y apparaissent. Ces semences sont en réalité le fruit du travail de nombreux êtres, qui travaillent en silence, ou presque. La pollinisation est à la fois le but, le gage de succès, et la manière de reproduire infiniment son jardin. Et tout cela est possible au moyen de l’échange de semences.
Dit plus simplement, les graines indigènes sont plus faciles à répandre dans la communauté que les graines de potager. Quand on veut des graines de carotte, on doit sacrifier ces racines pour le bien des carottes futures. Même chose pour les fèves; toute cosse récoltée pour des graines sera sacrifiée et n’ira pas dans notre dîner.
Au contraire, pour la plupart des plantes indigènes, on peut créer des jardins de semences à même nos paysages. Avec les bonnes techniques de récolte éthique, de distribution communautaire et de croissance assistée, n’importe quelle plate-bande peut nous fournir une quantité phénoménale de graines sur un certain nombre d’années. Pourquoi donc ne pratiquons-nous pas le concept de grainothèques dans les localités partout au Canada?
L’avancée du gazon sur le paysage, communauté végétale composée de très peu d’espèces, pour la plupart non-indigènes, n’est pas complètement irréversible. Avec les années, nous pouvons créer une biodiversité végétale impressionnante, quoique sur une plus petite surface. Grâce au travail d’une foule de disciplines, incluant d’horticulteurs (tels que Rick Darke), d’architectes paysagistes (Thomas Rainer), d’entomologues (Doug Tallamy et son équipe en Pennsylvanie, Heather Holm au Minnesota, et Gail Langellotto dans l’Oregon), les États-Unis sont le fer de lance d’un mouvement entier qui commence à s’étendre au Canada. On pense au phénomène Blooming Boulevards, au mouvement L’effet papillon de la Fondation David Suzuki, et plus récemment la Grainothèque de fleurs sauvages d’Ottawa.
Mais plus que tout, il faut mettre en plein centre les peuples autochtones et leur vision du monde. L’Île de la Tortue, comme notre continent est appelé dans plusieurs cultures, est le lieu de vie ancestral et actuel d’une vaste mosaïque de peuples autochtones. En raison de la colonisation, de l’oppression de leur culture et du bris des traités ancestraux qui ne parlaient pas de cession des terres, plusieurs d’entre eux ont largement perdu leurs connaissances liées aux plantes, à leur utilisation et à leur rôle dans la nature.
Des membres de ces peuples, comme la botaniste et conteuse Robin Wall Kimmerer, ont publié des ouvrages comme Braiding Sweetgrass (Tresser les herbes sacrées), celui-ci parlant des plantes indigènes comme pilier fondamental d’une façon de voir le monde. Cette perspective a trois “tresses” : La sagesse autochtone, le savoir scientifique et l’enseignement des plantes.
On doit semer maintenant tout ce qui appartient à cette terre, et non uniquement ce qui nous chante à nous les humains, si on veut avoir une chance de sauver les insectes, notre mode de vie et même les fondements de notre culture humaine.
C’est là où on se demande que faire, quand tout semble trop tard. L’opportunité de faire un grand impact est toutefois là, dans son jardin. Ces espèces sont loin d’être indésirables. Elles sont même superbes, à leur place, diversifiées et colorées, évoquant l’environnement dans lequel on habite.
Dans le sol de tout type, argileux, sablonneux ou même limoneux, se trouve le potentiel d’un stock infini de semences. On n’a qu’à choisir les bonnes espèces, adaptées à sa région et son sol, travailler initialement, puis attendre quelques années pour que les plantes fassent des fleurs et que les pollinisateurs trouvent notre oasis.
On sera ensuite récompensé par un jardin de semences, qui peut être aussi beau qu’on le veut. Qu’il soit formel ou un peu ébourrifé, il pourra nous offrir des graines, ces plantes portatives qui sont la clé du processus de restauration de notre écosystème. Dans plusieurs des cas, celles-ci sont la meilleure solution pour partager notre nature.
Voici les sections à être mis en lumière dans le guide. Revenez ici plus tard pour en savoir plus!